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Les Rencontres Sources

Préface

L’Aréopage « Sources » est l’Aréopage de Recherche du Grand Collège des Rites Écossais fondé en 1977 par le Grand Commandeur Chabanne (1917-2002) alors en fonction depuis un an. Il ne cachait pas dans les attendus du décret qui portait création de ce nouvel atelier la référence à la Loge de Recherches « Quatuor Coronati » de la Grande Loge Unie d’Angleterre fondée à la fin du xixe siècle et la volonté d’excellence que le Grand Collège attendait de lui.

Les membres de cet atelier, tous Chevaliers Kadosh, donc parvenus au degré sommital de la première séquence initiatique des Hauts Grades Écossais sont cooptés en fonction de leurs compétences reconnues dans les champs les plus variés et justifient donc d’une double expertise maçonnique et scientifique au terme d’une élection codifiée pour une période triennale renouvelable

Ils travaillent au sein de cinq commissions recouvrant l’ensemble des sciences humaines qu’elles abordent dans une perspective maçonnique.

Ces commissions sont au nombre de cinq :

  1. Sémiotique et herméneutique des pratiques maçonniques.
  2. Histoire et rituels.
  3. Science, philosophie, sociologie.
  4. La Règle, la Loi, le Droit.
  5. Arts et Lettres.

Parmi les fondateurs de cet Aréopage, il convient de citer trois noms : Bruno Étienne, Georges Lerbet et Daniel Ligou dont les travaux, dans leurs domaines universitaires respectifs, ont révélé leur caractère précurseur. Ces trois noms sont ceux que le Grand Collège a souhaité donner aux Prix Universitaires qu’ils décernent chaque année après délibération de son Conseil Scientifique des Prix Universitaires composé de neuf membres. Il s’agit :

  • du Prix Bruno Étienne concernant « Le fait religieux » lors d’un colloque sur ce thème organisé à Aix-en-Provence, sa ville d’élection ;
  • du Prix Georges Lerbet concernant les thèmes maçonniques fondamentaux que sont « Transmission, Instruction, Éducation » lors d’un colloque qui se tient annuellement à Tours où il enseignait à l’Université François Rabelais ;
  • du Prix Daniel Ligou concernant l’ « Histoire sociale, politique et maçonnique » lors du colloque historique d’automne du Grand Collège des Rites Écossais à Paris.

 

La qualité des travaux de cet Aréopage étant unanimement reconnu par la communauté intercontinentale de la recherche maçonnique, c’est donc tout naturellement qu’il s’est trouvé récompensé par l’attribution d’un prix prestigieux lors de la

« Third World Conference on history of Freemasonry »

organisée conjointement par la Fondation Académique Policy Studies Organization, fondation américaine de Sciences Politiques siégeant à Washington et présidée par Paul Rich, et le Musée de la Franc-maçonnerie sis 16, rue Cadet à Paris dirigé par son conservateur Pierre Mollier, avec pour partenaires exclusifs la revue Heredom, la revue Renaissance Traditionnelle et l’Aréopage « Sources ».

Cet Award remis le 15 juin 2019 à la Bibliothèque Nationale de France par le Président Pau Rich en présence du Grand Commandeur Jacques Oréfice, des passés et présents Grands Maîtres de l’Aréopage Jean-Henry Passini et Didier Desor ainsi que du Second Lieutenant Grand Commandeur en charge des publications Georges Lassous s’intitule :

« Kilwinning Awward for Lifetime Contributing to research and Scolar ship »

« For the « Aréopage Sources » / since 1977, this Lodge of the 30th has been studying and publishing a valuable true of materials and research on the high degrees of the Scottish Rite. Recently, they publishes a superb volume on the Rose Croix degrees and its history. »

Ce prix témoigne de la reconnaissance de la communauté de la recherche maçonnique intercontinentale de la qualité des travaux produits par cet Aréopage sous la direction éclairée de ses Grands Maîtres successifs à qui nous devons l’organisation méthodique du travail collectif.

 

L’Aréopage « Sources » inscrit ses activités dans la construction et la transmission de la culture écossaise en une confluence de trois axes :

  • Le travail académique en commission scientifiques se concentrant sur des thématiques ordonnées donnant lieu à des publications dans la collection Sources dont le n° 9 sur le grade de chevalier Rose Croix est signalé dans la mention du prix décerné rappelé ci-dessus. Ce travail construit avec une grande constance a produit une série de 8 numéros qui peuvent être qualifiés d’exemplaires par la rigueur de leur expression et la qualité de leur composition.
  • Le travail herméneutique est un travail sur les concepts maçonniques largement utilisés par les maçons (et les non-maçons) sans souvent en connaître et en reconnaître toutes les implications signifiantes. Ce travail présenté lors de rencontres annuelles réservées aux seuls Écossais, membres de la Juridiction ou non, est publié dans une collection spécifique intitulée Rencontres Sources dont la création, 40 ans après celle de Sources imprime un nouvel élan à ce qui est devenu une institution. Ce travail vise à donner à notre Juridiction du Grand Orient de France et à ses membres un corpus conceptuel cohérent.
  • Le travail heuristique est un travail libre des membres de l’Aréopage autour d’un thème qu’ils choisissent librement et auxquels ils contribuent tout aussi librement et qu’ils livrent au cours d’un colloque annuel ouvert aux apprentis ainsi avertis non seulement de l’existence de cet Aréopage mais aussi de son accessibilité. En effet non seulement le colloque est libre mais les actes en sont publiés dans la collection Les Essais Écossais dont tout lecteur intéressé, maçon ou non, peut prendre connaissance.

Pourquoi le Grand Collège a-t-il éprouvé la nécessité de créer ces « Rencontres Sources » ? La réponse tient dans la fameuse phrase d’Albert Camus dont la véritable rédaction, comme en témoigne son essai « Sur une philosophie de l’expression » paru dans Poésie 44 est la suivante :

« Mal nommer un objet, c’est ajouter au malheur de ce monde ».

 

L’objet, et non pas « les choses » comme il est dit habituellement, est à prendre chez Camus dans le sens de l’objet philosophique. Donc mal nommer cet objet revient à détourner de lui une partie de sa vérité.

Dans 1984, Georges Orwell démontre que le pouvoir peut exercer pour se pérenniser un appauvrissement syntaxique et lexical excluant les ambigüités et les synonymes. La « Lingua Tertii Imperii », la langue du IIIe Reich, sans produire de langage propre, a détourné le sens des mots dans une bureaucratisation du langage. Victor Klemperer comme Hannah Arendt ont largement démontré que le langage bureaucratique constitué de clichés et d’automatismes conduit ses utilisateurs à une impossibilité de penser. Les mots du pouvoir sont d’une autre essence que le pouvoir des mots qui nécessite une éthique du langage.

Le langage maçonnique en général prolongé par le langage maçonnique des Hauts Grades Écossais s’intègre dans les spécificités relationnelles comme la gestuelle qui sont au fondement même de toute société initiatique.

Ainsi, Jean-Pierre Lassalle dans son livre La formation et l’évolution du vocabulaire de la Franc-maçonnerie au xviiie siècle distingue quatre types de langage :

  • un ergo-lecte ou langage technique du corps de métier, en l’occurrence celui des francs-maçons opératifs ;
  • le socio-ordino-lecte ou langage propre au groupe social que forme la société des chevaliers ;
  • l’hagio-lecte, ou lexique extrait des textes sacrés pour la plupart d’origine judéo-chrétienne mais pas seulement, qui est le langage sacré des moines ;
  • le crypto-lecte ou langage caché qui rend l’ensemble incompréhensible et inaccessible aux non-maçons.

Il convient de constater que ces distinctions linguistiques recouvrent très exactement la tri-fonctionnalité des sociétés indo-européennes identifiée par le frère Georges Dumézil, ethno-anthropologue dès 1938 or cette trifonctionnalité n’existe pas dans la tradition judéo-chrétienne et n’apparaît dans la littérature chrétienne qu’au cours du ixe siècle pour s’affirmer au xie siècle, période d’institutionnalisation de la Franc-maçonnerie opérative et des ordres monastiques militaires dont nous assumons aujourd’hui l’héritage spirituel.

Rappelons ici que cette théorie de la tripartition identifie trois fonctions nécessaires à la vie en société donc à la survie des dites sociétés, théorie qui s’est très largement vérifiée Elle reprend les trois ordres de la société féodale qu’avait énoncé Haymon d’Auxerre en 860 et qu’a théorisé Georges Duby dans son livre Les trois ordres ou l’imaginaire du féodalisme

Ces trois ordres qui ont marqué le dernier millénaire occidental sont :

  • les laboratores, ceux qui travaillent donc, dévolus à la production ;
  • les bellatores, ceux qui combattent, donc voués à la protection ;
  • les oratores, ceux qui prient, donc investis du sacerdoce et du sacré.

 

Georges Dumézil pose la question suivante « L’esprit humain choisit sans cesse parmi ses richesses latentes. Pourquoi ? Comment ? »

Nous avons choisi nos richesses, celle de notre triple héritage maçonnique, chevaleresque et monastique dont nous explorons les mots pour en faire des concepts afin qu’ils reviennent justes et parfaits, ce qui permet « un langage clair pour ne pas épaissir le mensonge universel ». En effet, les concepts ne sont pas seulement des indicateurs des processus de pensée mais aussi des facteurs de ces processus et en définitive des acteurs.

 

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